Semaine 7. Taroudant.
Les jours se confondent et se superposent. Le temps passe, il a pris l’autoroute, il n’a plus le temps d’attendre, je me fonds dans le tourbillon, je trébuche, je cours, je perds le cap, j’ai le regard fixé sur l’horizon.
Les oiseaux chantent dehors. Il y avait des travaux à l’extérieur, ce matin.
Je suis devant mon clavier et je me demande ce que je vais bien pouvoir écrire. Je me demande ce qu’il y a de nouveau à raconter dans ce monde étranger qui m’est devenu familier.
Il y a tant de choses à dire, mais le temps s’enfuit et il emporte avec lui même les mots.
C’est le Ramadan, les rues sont vides le matin et l’après-midi. Je crois que je me suis habituée à ces nouveaux horaires mais je me retrouve encore parfois devant des magasins fermés. J’ai mis du temps à prendre le pli. Il m’a fallu quelques mésaventures (frigo vide et magasins fermés font un duo qui n’a pas plu à mon estomac) pour graver des nouveaux horaires informels dans mes habitudes. La plupart des échoppes n’ouvrent pas avant 10h et elles referment vers 12h30. Elles rouvrent vers 15h et ferment pour la rupture du jeûne, à 19h.
Les rues regorgent de petites échoppes, de vendeurs de fruits disposés sur des chariots, de boucheries reconnaissables de loin à leurs couleurs rouge éclatant et blanche et à la viande qui pend en extérieur, de vendeurs de dattes. Le Ramadan a garni les étals de denrées spéciales notamment les chabbakiyas, ces fleurs de pâte, de sucre, de fleur d’oranger et de graines de sésame, qui calent en deux bouchées -je ne recommande pas de commencer un repas par ça.
Lorsque je sors vers 18h, les enfants jouent au football dans la rue et l’on entend leurs cris s’élever dans le ciel. Tout objet peut faire office de ballon si l’on vient à en manquer comme les bouteilles en plastique et les balles de tennis.
Le football semble occuper une place importante, peu importe les âges. On trouve des terrains de football même dans les villages les plus reculés dans les montagnes. Les cafés ont tous une télévision qui diffuse les matchs. Les terrains vagues et les terrains plus aménagés sont toujours remplis à partir du milieu d’après-midi.
Les rues se vident un peu avant l’appel à la prière, les voitures sont plus pressées, les mères rappellent les enfants. On monte la table et les yeux brillent. Une fois que l’appel retentit, on peut rompre le jeûne, manger la harira, cette soupe un peu visqueuse aux flocons de semoule qu’on accompagne de dattes, les chabakkyias et autres sucreries, boire le thé et le jus d’orange frais et tous les plats qui auront été préparés pour rassasier des estomacs affamés.
L’autre jour, je suis ressortie le soir, vers 21h, après la grande prière. La nuit était fraîche après la chaleur de la journée. Trente cinq degrés dans la vallée, ça commence à devenir un four à ciel ouvert. Le pouls de la ville semblait battre à nouveau ; les vélos qui filent dans la rue, les cafés remplis, les magasins de vêtements qui ouvrent et les femmes qui déambulent, en groupe de trois ou de cinq.
Après de multiples tentatives infructueuses en journée, j’ai même fini par payer ma facture de téléphone en agence à 22h ! Il faut une première à tout.
Ramadan karim.
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