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L'attente sous le soleil de Beyrouth.

marielinen

Dernière mise à jour : 15 mai 2022

Beyrouth, Sodeco.

Il est neuf heures et j’attends qu’on vienne me chercher. Je suis plantée depuis cinq minutes en bas de l’hôtel "Sodeco suites" et je commence déjà à regretter mon polo à manches longues. Je suis censée passer la journée en intérieur, pas frire sur le trottoir.

L’hiver est définitivement passé. Les arbres ont fleuri et verdi. Ils n’ont pas encore atteint le stade où leurs branches seront recouvertes de leur parure de couleur. Le vert tranche avec la grisaille du paysage et je me sens respirer.

Quand le trafic diminue, je peux même entendre un ou deux oiseaux pépier. La nature n’a pas totalement fui la ville.

Je ne peux m’empêcher de trouver cette pensée rassurante. Comme si nous avions une chance de survivre dans ce clapier à ciel ouvert, tant que la nature n’aurait pas déserté le béton, les ruines et les maisons qui tiennent debout et tendent vers le ciel.

Un camion passe et ralentit au tournant. C’est un de ces camions avec des drapeaux libanais, des couleurs bleus et oranges qu’on voit souvent sur la route qui relie Beyrouth à Damas.

Le jeune garçon côté passager me jette un regard appréciateur depuis la fenêtre ouverte du véhicule. Il sourit.

Je ne souris pas en retour et une sensation de malaise grandit en moi. Heureusement, le camion avait juste ralenti au carrefour avant de tenter sa chance -pas de priorité, pas de feux de circulation.

L’impression d’être une marchandise sur un étalage est tout, sauf agréable. Je ne peux m’empêcher de jeter un coup d’oeil à mes vêtements. Je m’en veux immédiatement d’avoir gobé cette idée que mes vêtements puissent justifier des comportements inappropriés.

Mon regard s’est durci sous mes lunettes de soleil.

Les minutes se transforment en dizaines de minutes. Les klaxons de taxis qui espèrent avoir trouvé une cliente se multiplient.

M’a-t-il oublié ? Où est il ? Que font-ils ?

Une jeune femme s’arrête et me parle en arabe. Je crois qu’elle me parle de sa fille. Elle a cette expression que les gens ont quand ils mendient. Je ne sais pas si c’est du désespoir.

Je lui dis que je ne comprends pas et elle me répond « money ». Alors je dis non et elle continue sa route. Sa robe longue et noire bat le vent et je me questionne encore et encore sur la mendicité, si j’aurais dû l’aider, si ça l’aurait vraiment aidé.

Mais il est déjà trop tard et j’attends encore. Je pose mon sac à dos sur le sol. J’ai mal aux pieds.

Ça va faire trente minutes que j’attends.

Heureusement, une brise souffle légèrement. C’est la même danse qui se répète : les klaxons des taxis, le passage des voitures et des scooters, une mère qui s’arrête avec ses deux enfants en me demandant de quoi leur acheter à manger, un couple qui cherche une association syrienne.

L’attente sous le soleil de Beyrouth.

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