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En route vers le Chouf

Le van roule sur l’autoroute qui nous emmène au Chouf. Pour ce trajet, c’est un van de luxe : on a de la climatisation, de la place aux pieds, les sièges sont recouverts d’un plastique solide protecteur et nous sommes neuf voyageurs pour au moins vingt places. On dirait un bus scolaire, un peu comme on en voit dans les séries américaines, avec une porte coulissante automatique pour entrer ; à la seule différence qu’il est blanc et ses sièges sont gris.

Je finis mon sandwich falafel et je mets pleins de miettes sur moi. Tu lis tranquillement à côté de moi et j’apprécie le calme de ce bus. Pas de chauffeur qui s’engueule au téléphone ou qui enregistre des messages vocaux sur whatsapp, pas de musique de fêtes à fond les ballons.

Le seul truc avec ces bus c’est qu’ils vont souvent moins vite que les vans plus petits -des boîtes à sardines qui filent sur la route.

Ça laisse le temps de voir le paysage. Depuis une ou deux semaines, les panneaux publicitaires ont changé. Ils avaient été plus ou moins laissés à l’abandon après la folie des élections, les slogans et pancartes se déchiquetaient dans le vent. On voit encore des visages qui nous disent “ensemble pour des lendemains meilleurs” ou encore “avec vous jusqu’à la fin” -vraiment, jusqu’à la fin ? Il y a vraiment des hommes politiques qui voient la fin ?

Ça peut encore s’empirer ?

L’idée n’est pas plutôt de trouver des solutions plutôt qu’un compagnon pour toucher le fond ?

Peut être que je n’ai vraiment rien compris à la politique. Ou c’est ma traduction qui ne reflète pas le message ; j’ai dû mal comprendre.

Entre le vert des arbres, j’avais vu fleurir les panneaux pour des céréales fourrées mais là, c’est un tout nouveau type de pubs qui pullulent et qui viennent remplacer le chaos d'une réalité politique tumultueuse. Des annonces qui disent “ça nous avait manqué de faire la fête dans le sud du Liban”, qui nous vendent des hôtels de luxe “la meilleure destination” et qui nous proposent d’acheter des villas ou des propriétés à partir de 390 000 dollars. Un tout nouveau panneau qui prend une place effarante, c’est-à-dire bien trop pour moi, propose même un logement à partir d’1 000 000 de dollars.

C’est un tout nouveau Liban que je découvre. Un Liban où les expatriés sont rentrés pour l’été. Un Liban qui a des millions, n’ont pas de livres libanaises, mais de dollars.

Je me demande parfois comment tant de réalités peuvent exister sans qu’il y ait collusion, comment elles peuvent exister et s’ignorer ou se regarder sans se détruire.

Et la route défile, les champs de bananiers et de maïs remplacent les magasins, les restaurants, les pubs, les échoppes où on s’arrête en bord de route et quelqu’un vient à la fenêtre nous demander ce que l’on veut et nous le ramène -pas besoin de descendre de voiture- et les vendeurs de pastèques, de pêches, d’abricots et j’en passe aux stands mobiles.

Et nous entrons dans la montagne encore plus profondément pour se noyer dans une forêt de verdure, au fin fond des montagnes druzes.

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Arazane

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